I/2 : Le torchon brûle
- Je me demande vraiment comment tu fais pour les reconnaître, Edith.
Je sais jamais laquelle est laquelle. A qui je donne le biberon, là ?
Eva ? Emma ?
- Tu fais vraiment aucun effort ! C’est pourtant pas difficile !
Eva a les traits plus fins et des petits yeux en amande.
Emma te ressemble Gérard : Elle a le teint mat et de grands yeux.
- Des petits yeux et un grand four ? Alors, ça doit être Eva.
- Pfff un grand four ! Est ce que je t’ai parlé d’une grande bouche ?
Faudrait quand même voir à pas raconter n’importe quoi, Gérard !
- Un grand four ! Et puis quoi encore ?
… s’est pas regardé !
- Tu disais ?
- Je disais : Si les petites te dérangent c’est pas difficile Gérard :
On divorce et je garde mes filles !
- On divorce ?! Enfin, Edith ! Tu parles pas sérieusement là ?
- Je suis tout ce qu’il y a de plus sérieuse, au contraire Gérard !
- M’enfin Edith ! Qu’est ce qui se passe ?
Qu’est ce que j’ai dit de si terrible ? On divorce pas pour ça !
A moins… a moins qu’il y ait une autre raison, explique-moi !
- Tu veux vraiment savoir Gérard ?! J’en ai ASSEZ !!
Assez de passer mon temps à nettoyer, faire la cuisine, repasser ta blouse et tes chemises, faire les lits, remonter le moral des enfants à cause de tes principes de vieux ! Plus le temps passe, Gérard, plus j’ai l’impression d’avoir épousé ta mère !
- Laisse ma mère en dehors de ça ! Elle est pour rien dans ce…
cet accès de folie furieuse ! Voilà, je cherchais le mot.
Mais regarde-toi ! T’es devenue complètement folle, ma pauvre Edith !
- Bla-bla-bla-bla ! Cause toujours, je t’entends même plus !
- Folle ! C’est bien ce que disais.
- BON ! C’est fini, le cinéma ? Si tu me disais ce que tu me reproches ?
- Je sais pas... Tout et rien.
- Rien ! Je te le fais pas dire !
Alors maintenant, tu vas te calmer et te comporter comme une grande fille.
Tu crois que je peux te faire confiance ?
- Oui, Gérard ! Chais pas ce qui m’a pris.
- Bien ! Si on allait déjeuner ? T’as quelque chose de prêt ?
- Il doit me rester des hamburgers.
- Le problème avec toi Edith, c’est que tu manques de maturité.
A toujours rester à la maison… Je te le reproche pas, note bien.
- Mais Gérard, c’est toi qui as voulu que j’arrête mon travail à la naissance de Claude, tu te souviens pas ?
Tu me disais qu’avec ce que je gagnais comme vendeuse, si fallait payer une nourrice, ça valait pas le coup.
- On était d’accord, je dis pas le contraire. Et après Claude, y a eu Angèle.
Mais si t’avais voulu, rien t’empêchait de reprendre le travail par la suite.
Faut croire que ça t’arrangeait bien.
- Quoi ? Qu’est ce qui se passe ?
Maman ??
- C’est rien Claude ! Juste que… ton père me reproche de ne pas travailler.
- Et voilà ! Tu déformes tout encore une fois !
Je t’ai jamais reproché de pas travailler, Edith. Je dis simplement –et je répète-
que de s’occuper des enfants et de la maison, c’est pas ce qu’il y a de plus épanouissant.
La preuve : t’en es encore à faire des caprices comme les gosses.
- Excuse-moi Gérard, je saisis pas bien.
Tu dis que c’est parce que je reste à la maison que je manque de maturité.
A côté de ça, tu dis que tu me reproches pas de le faire.
Tu te contredis, enfin… je trouve.
- C’est tout toi, ça Edith !
J’essaye de t’aider à comprendre tes contradictions et ça se retourne contre moi.
- Y a un blème ? C’est quoi le blème ?
- Nan, y a rien ! Rien qui te regarde !
Dépêchez-vous de manger et allez vous amuser dans votre chambre.
- Meu-heu-heu !! Si s’passe quek’chose, on a bien le droit de savoir !
- T’as surtout le droit de faire ce que je te dis !
- Hé Claude, c’était quoi le problème ?
- Je te raconterai, t’inquiète !